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  • Construire des ponts vers le marché du travail : un dilemme pour les personnes immigrantes

    by Eric Poehlman  |  November 15, 2012

    Les personnes qui immigrent au Québec et au Canada rencontrent de nombreux obstacles lorsqu’elles veulent intégrer le marché du travail. En voici quelques-uns:

    1. L’exigence de l’expérience québécoise par la très grande majorité des employeurs;
    2. Un réseau de contacts peu développé;
    3. Un manque de reconnaissance de leurs qualifications et compétences (Schellenberg et Maheux, 2007).

    Malgré des niveaux de scolarité élevés, le taux de chômage des personnes immigrantes est plus important que celui des québécois nés ici; les salaires sont également plus bas chez les personnes immigrantes que chez les autres québécois. Tous ces éléments concourent à faire des personnes immigrantes une main d’œuvre peu valorisée, sous-employée et sous-payée.

    Ces défis requièrent des solutions créatives afin de mettre un terme au gaspillage de talent que l’on observe actuellement. On peut se poser la question : y-a-t-il des manières de faire en sorte que davantage de personnes immigrantes trouvent des emplois qui correspondent à leurs véritables compétences? Pouvons-nous développer des stratégies innovatrices pour aider ces personnes à faire reconnaitre leurs qualifications et leurs compétences?

    Nos solutions

    Le secteur de la formation continue au Collège Champlain Saint-Lambert a à cœur cette situation; voilà pourquoi, nous avons développé des services qui permettent de faire face à certains des obstacles rencontrés par les personnes immigrantes. De plus, nous mettons en place une stratégie à deux volets qui a pour but de fournir des services intégrés de formation et de mentorat aux personnes immigrantes qualifiées.

    Des candidats à la RAC qui travaillent à obtenir leur AEC dans leur classe.

    Le premier volet de notre stratégie consiste à travailler avec les personnes immigrantes qualifiées, à travers notre processus de reconnaissance des acquis et des compétences (RAC). Le processus RAC est destiné à des personnes qui ont une expérience significative dans leur domaine. Celles-ci doivent avoir développé une série de compétences fondamentales, qui n’ont pas été formellement reconnues par une institution ou une organisation québécoise. Les services RAC peuvent offrir une reconnaissance officielle de ces compétences en utilisant une série d’évaluations fondées sur les habiletés correspondantes requises en milieu de travail.

    En fait, nous demandons aux candidats RAC de nous montrer ce qu’ils savent faire au lieu de les mettre dans la situation de devoir « réapprendre » les savoirs qu’ils ont déjà acquis à travers les expériences de vie et de travail. Compléter avec succès le processus RAC donne accès à un diplôme ou une AEC (Attestation d’études collégiales). Souvent, une reconnaissance officielle sous forme de diplôme ou d’attestation de niveau collégial contribue à faciliter la transition des personnes immigrantes qualifiées vers le marché du travail.

    Un mentor qui aide une personne à comprendre quelque chose sur un portable.Le deuxième volet de notre stratégie consiste à travailler avec les personnes immigrantes au début de leur intégration sur le marché du travail canadien. Pour atteindre cet objectif, Champlain College Saint-Lambert a développé un nouveau programme, qui s’intitule Mentorat+. Ce programme associe des personnes immigrantes qualifiées à des mentors dans leur environnement de travail afin d’accompagner celles-ci pour leur intégration. Les employés nouvellement embauchés ont donc accès une personne ressource attitrée qui leur permet de mieux comprendre les critères de performance ainsi que les façons de faire des entreprises québécoises. Nous croyons que ce programme aidera à la rétention et au développement de carrière des personnes immigrantes dans leur environnement de travail. De plus, à long terme, la relation mentorale, de par sa réciprocité, contribue à la diversité culturelle de la main d’œuvre. Globalement, on peut dire que le programme Mentorat+ prolonge les services RAC directement en milieu de travail en offrant du soutien aux personnes immigrantes qualifiées une fois qu’elles sont en emploi.

    Anna Maria Zaidman, qui dirige les services Mentorat+ au Collège Champlain Saint Lambert, possède une expérience de travail significative avec les personnes immigrantes, ce qui lui permet de relever les défis propres à cette nouvelle initiative. Madame Zaidman suggère que Mentorat+ peut être considéré comme le « chainon manquant » de l’intégration en emploi des personnes immigrantes. Ce programme offre un soutien à la recherche d’emploi ainsi qu’une aide à la rétention en emploi et au développement de carrière, à travers une relation d’accompagnement. Le mentorat permet l’accès à un réseau de collègues – à l’intérieur d’une organisation – qui peuvent aider les nouveaux employés à s’intégrer dans une équipe de travail. Cette intégration peut impliquer de nombreux défis lorsque les nouveaux employés sont des personnes immigrantes récemment arrivées au Québec. Ces dernières peuvent faire face à des préjugés, de la discrimination ou simplement à une méconnaissance de leur expérience de la part de leurs collègues et de leurs superviseurs. Les personnes immigrantes ayant récemment immigré au Québec doivent également relever le défi de comprendre des codes culturels en emploi qui ne sont pas explicites et que les employeurs, en général, présument qu’ils connaissent déjà.

    Un programme de mentorat en entreprise est un moyen de surmonter ces obstacles. Nous croyons que la stratégie de formation continue qui vise à combiner les services RAC avec le mentorat en entreprise a le potentiel d’offrir des bénéfices directs et indirects à divers degrés.  Les personnes immigrantes qualifiées ont l’opportunité de vivre une situation d’apprentissage contextualisée et d’être guidées à travers plusieurs expériences concrètes centrées sur la réussite de leur carrière. Les CÉGEP et les organisations gouvernementales bénéficient du développement d’un modèle unique, qui est adaptable, durable et a le potentiel d’être répliqué au niveau national. Les entreprises en bénéficient également parce qu’elles ont ainsi accès à un bassin de candidats qualifiés et enthousiastes qui sont techniquement et personnellement préparés pour des carrières techniques.

    Réferences

    Schellenberg, Grant and Hélène Maheux. 2007. “Immigrants’ perspectives on their first four years in Canada: Highlights from three waves of the Longitudinal Survey of Immigrants to Canada.” Canadian Social Trends. Special Edition. Statistics Canada Catalogue no. 11-008-XWE. (Accessed February 5, 2010.)

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